17 novembre 2013 19h09

R.WOLF
Si la servitude est contagieuse, la liberté l' est aussi

Une femme prend la défense des Pussy Riots (là où engoncés dans leurs certitudes et leur sale petit conformisme à la con), personne n' a su quoi dire (ça c' est de moi). Un texte signé Annie Lebrun

CHANGER LA VIE » OU LE PLUS DIFFICILE À IMAGINER, par Annie Le Brun
18 AOÛT 2012 par PAUL JORION
Billet invité.

A prendre connaissance du dernier « Temps qu’il fait » et de l’état des lieux qu’il révèle, comment ne pas être saisi autant par la gravité de la situation que par l’ampleur du pari fait sur ce qui n’a peut-être pas commencé mais qui serait pourtant en train de s’inventer ici, là, maintenant, ailleurs, en dehors des chemins balisés, que ce soit dans la solitude d’une adolescence ou à travers la solidarité informelle et néanmoins de plus en plus réelle de ceux qui refusent ce monde ?

De cette certitude que tout se tient, dépend, en effet, l’acuité du regard mais aussi la détermination à ne pas accepter l’inacceptable. Et ne le verrait-on pas à cause de la complexité de nos sociétés à laquelle il est justement fait allusion, oui, il y a un rapport entre l’affaire de l’extradition de Julian Assange et la fusillade de New York. Comme ce n’est pas sans lien avec le rapport qu’il y a entre le massacre des mineurs d’Afrique du Sud et les questions de régulateurs qui inquiètent aujourd’hui la banque Standard Chartered. Mais comme il y a aussi un rapport de tout cela avec la révolte et la condamnation des Pussy Riot aujourd’hui en Russie. Où qu’on se tourne, voilà que l’inacceptable commence à être perçu comme tel mais pas par les mêmes et pas de la même façon.

Ainsi, que ces trois filles, belles de leur insolence, aient eu le courage de s’en prendre, en toute connaissance de cause, au pouvoir et à l’église russes réunies aura été un feu de joie dans la grisaille de cet hiver 2012. Il faut voir la vidéo de leur intervention du 21 février dernier dans la cathédrale moscovite du Christ-Sauveur « haut lieu du renouveau orthodoxe en Russie », où, après leur prière à la vierge Marie pour « chasser Poutine », l’honneur du mâle en question se trouve d’abord défendu, avant l’arrivée de la police, par des sortes de sœurs converses, complétement affolées devant quatre jeunes diables déchaînés, en cagoules et collants bariolés. Et il me paraît très significatif que, contrairement à un certain nombre de jeunes gens et vraisemblablement au nom d’un sérieux politique décontenancé par un mélange d’humour et de radicalité, on n’aura pas mesuré l’enjeu de cette affaire, à savoir, comme le souligne un de leurs amis, l’artiste Oleg Koulik, que ces filles se retrouvent en prison, « parce que le pouvoir ne peut pas admettre qu’on critique l’Église, la seule institution qui, dans le cas d’une révolution, se lèvera pour sa défense ».

Pareillement, il ne me paraît pas indifférent que ces jeunes féministes, comme j’avais rêvé qu’on le fût il y a trente cinq ans, ont été condamnées à deux ans de camp par une juge. Comme il n’est pas indifférent qu’au même moment elles étaient soutenues par une splendide fille qui, torse nu et en signe de solidarité, aura abattu une croix à la tronçonneuse en quelques minutes. Comme il est encore moins indifférent qu’elles aient purement et simplement rigolé, à la lecture des attendus de leur condamnation.

En fait, féministes, écologistes, militantes de la cause homosexuelle, liées à des collectifs d’artistes contestataires …., si Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samoutsevitch et Maria Alekhina sont coupables, c’est d’être RÉVOLTÉES, moins en tant qu’artistes qu’à vouloir, semble-t-il, « changer la vie », vraiment. Et c’est peut-être cela qui est ici difficile à imaginer, quand la plupart de nos artistes, champions de la subversion subventionnée se livrent à tous les détournements et recyclages possibles, pour en fin de compte chacun trouver sa place dans l’entreprise de neutralisation en cours. À l’inverse, on ne peut qu’être impressionné par la façon dont ces Pussy riot se seront réappropriées l’insurrection Punk, pour lui redonner la charge de révolte dont le marché du disque des années soixante-dix avait su immédiatement la dépouiller.

Et c’est sans doute pourquoi, après les avoir accusées d’« hooliganisme », on les aura finalement convaincues de « vandalisme » et d’« incitation à la haine religieuse », pour dépolitiser un propos qui ne se laisse pas réduire à telle ou telle idéologie. Dans ces cas-là, l’aberration des chefs d’accusation est toujours proportionnelle à l’inquiétude suscitée : il n’y a pas loin de « l’hooliganisme » au « cosmopolitisme » et le flou de la formulation cache toujours une partie de la « bête immonde. » De toute façon, la résonance internationale du procès est un signe. Quelque chose de cette révolte demande à être entendu.

Peu importe que telle ou telle vedette médiatique se retrouve à soutenir ces jeunes femmes. Pour ma part, je ne peux que m’en réjouir, au moment où le processus de domestication généralisée s’accélère, à voir les grands moyens adoptés pour réinjecter, par exemple à l’occasion des Jeux Olympiques, les valeurs d’asservissement que sont la famille, la patrie et la religion, celles-ci bien sûr présentées sous de nouveaux emballages.

Ce sont là autant de signes contradictoires que non seulement les structures de ce monde sont en train de lâcher mais aussi que peu à peu les choses finissent par apparaître à leur scandaleuse lumière, pour provoquer, comme en pointillé, ici, là, le refus de continuer à participer de ce jeu-là.

J’ai dit ailleurs que si la servitude est contagieuse, la liberté l’est aussi. Nous en sommes à ce point d’équilibre instable, où tout peut basculer d’un côté ou de l’autre. D’où l’importance de repérer tous les signes et nous ne serons jamais trop pour tenter de discerner ce qui advient. C’est pourquoi il me déplairait qu’on fasse fi de l’insaisissable jeunesse de cette révolte venant de l’Est. Pensez aux Provos, pensez aux Hippies, aux « aventuristes » de 68… il y aura toujours l’insolente beauté de ce qui commence. Aussi, quand bien même « en matière de révolte, aucun de nous ne doit avoir besoin d’ancêtres », il se pourrait que tout débute avec le « retour du refoulé », mais ailleurs et autrement. Comme si chaque insurrection était riche de tous les rêves précédents encore à venir, c’est-à-dire comme si, à chaque fois, il s’agissait de jouer le Grand Jeu.

Il faut peut-être le savoir pour commencer à voir.

http://www.pauljorion.com/bl...

Bon, il y en a une qu' est en Sibérie comme au bon vieux temps et vive Poutine!!

17 novembre 2013 22h19
modifiée
17 novembre 2013 22h22

R.WOLF
Ecriture automatique?

Alors continuons par là ... Rimbaud Ferré Le bateau ivre




Le bateau ivre

Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J'étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées
N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l'oeil niais des falots !

Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sûres,
L'eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,
Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
Et rhythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l'amour !

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants : je sais le soir,
L'Aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très antiques
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !

J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes,
Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !

J'ai suivi, des mois pleins, pareille aux vacheries
Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !

J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides
Mêlant aux fleurs des yeux de panthères à peaux
D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides
Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux !

J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !
Des écroulements d'eaux au milieu des bonaces,
Et les lointains vers les gouffres cataractant !

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !
Échouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés des punaises
Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
- Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades
Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
Montait vers moi ses fleurs d'ombre aux ventouses jaunes
Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...

Presque île, ballottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d'oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds.
Et je voguais, lorsqu'à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir, à reculons !

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau ;

Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur ;

Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets !

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
- Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t'exiles,
Million d'oiseaux d'or, ô future Vigueur ?

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,
Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons.


http://poesie.webnet.fr/lesg...

18 novembre 2013 05h16

jamydefix
Sans le savoir, le désordre établi se condamne à disparaitre en emprisonnant ses miroirs, ses enfants.
Ses jeunes femmes retrouveront la liberté et seront ou détruites ou plus fortes que jamais.

18 novembre 2013 09h25

TOTOCACA
Trop de liberté rend esclave l'homme de cette derniére. les règles l'en affranchi. je sais plus de c'est qui.

18 novembre 2013 12h09

R.WOLF
Je dirais que celui qui ne veut pas se libérer a déjà renoncé à sa vie.

@ Toto ; connaître les règles pour mieux s' en affranchir. Je ne sais plus non plus de qui c' est (de toutes façons on s' en fiche un peu de ça, non?).

18 novembre 2013 14h06

TOTOCACA
La liberté de quoi d'écraser son voisin? la liberté de pourvoir lâcher une pèche devant ta porte. La liberté de faire ce que je veux au détriment des autres. la liberté est une notion très relative qui peut vite tourner à l'enfer sans règle malheureusement.

18 novembre 2013 15h00

R.WOLF
Je pense qu' il est souvent bien de s' en tenir au sens premier des mots, ainsi je dirais que la liberté n' est pas faire forcément n' importe quoi. Evidemment ce qu' est et n' est pas ce n' importe quoi prêtera à débat.
Ce mot liberté, dans nos démocraties qui n' en sont pas est une coquille vide à mon sens ; nous avons des droits mais sommes tributaires de l' argent pour en jouir, au final c' est comme si nous ne les avions pas (ces droits). D' où mon mécontentement souvent.
Inutile de me dire d' aller voir en Corée du Nord, mais je sais que tu ne me sortiras pas ce genre de foutaises.

18 novembre 2013 15h03
modifiée
18 novembre 2013 15h07

lurette
Selon Hegel, "on ne serait pas vraiment libre dans un monde sans règles ; car il en resterait toujours une: la loi du plus fort."
Selon Rousseau, "la liberté morale seule rend l'homme vraiment maître de lui ; car l’impulsion du seul appétit est esclavage, et l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté"

Trop de liberté tue la liberté, mais..

"Renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme, aux droits de l'humanité, même à ses devoirs." Rousseau
"La première raison pour laquelle les hommes servent volontairement, c’est qu’ils naissent serfs et qu’ils sont élevés comme tels." La Boétie
(précurseur de la desobeissance civile, La boetie (à 19 ans tout juste)
http://fr.wikipedia.org/wiki...

"Pour accéder à la liberté, il faut n'être ni maître ni esclave"

18 novembre 2013 15h04
modifiée
18 novembre 2013 15h11

TOTOCACA
la liberté est un du ou elle s'acquiert? je te citerais bien du voltaire "Plus les hommes seront éclairés plus ils seront libres". les idiots sont malheureusement condamnés à subir.

18 novembre 2013 17h14

R.WOLF
Après ça il reste encore à trouver le bonheur et là, on redevient tous égaux, idiots comme intelligents.
Ce à quoi on me rétorquera, à quoi sert-il d' être heureux si on' est pas libre?

Entre heureux et libre, vous choisissez quoi? Moi la liberté, je ne suis pas trop doué pour le bonheur, toujours trop rare, trop capricieux à atteindre.

19 novembre 2013 10h21

jamydefix
Les humains comme les poisons, les oiseaux, les fourmis qui sont tous en liberté conditionnel ou relative.
Connaitre et respecter les libertés de chacun, c'est accepté de chercher son bonheur dans les limites d'un univers en liberté relative.

19 novembre 2013 10h46
modifiée
19 novembre 2013 16h37

TOTOCACA
je pense que l'intellect entre pour beaucoup pour savoir se qui nous rend heureux et libre ou pas, tout comme une profonde connaissance de soi. combien de personne par méconnaissance d'eux même ont des comportements autodestructeur et ne sont pas capable de se modifier pour atteindre une pseudo sérénité dans la vie. et se condamnent à subir et réitérer 150 fois les mêmes conneries? je suis entièrement d'accord avec voltaire.

19 novembre 2013 18h47
modifiée
19 novembre 2013 19h43

R.WOLF
On a l' éducation pour pallier aux carences de l' intellect, or ça ne suffit pas, des matières comme communiquer de soi à soi, de soi aux autres, des bases de psychologie (émotions, sentiments, histoire personnelle, rapport aux autres)en restant complètement absentes ; avec les conséquences qu' on sait.

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